A la fin du parcours thématique qu’on propose aux visiteurs de l’exposition permanente du Musée National de l’Histoire et des Cultures de l’Immigration à Paris, on tombe sur une vitrine destinée aux traces que la figure de l’immigré et la «question de l’immigration» ont laissées dans l’univers du cinéma français. En fait, la représentation de l’immigration dans le cinéma français est presque aussi variée et complexe que le phénomène historique et social à laquelle elle se réfère, phénomène qui date depuis au moins deux siècles s’étant intensifié considérablement au XXe siècle, après la Grande Guerre, durant le règne des totalitarismes et les processus de décolonisation jusqu’aux grands mouvements migratoires sous le signe de la mondialisation qui caractérisent la situation actuelle. Par conséquent, l’ensemble des films français sur l’immigration ne relève pas seulement de la diversité des origines des immigrés –Espagnols, Portugais, Juifs, Américains, Maghrébins, Africains, Vietnamiens, etc.– mais aussi des différentes étapes de l’histoire de l’immigration en France ainsi que de la variété des attitudes envers les immigrés, qui va de l’ignorance et du racisme ouvert jusqu’à la satisfaction de leur intégration «réussie». Dans le cinéma français d’aujourd’hui le sujet est envisagé des points de vue thématiques et artistiques les plus variés: à côté des comédies à grand succès telles que Intouchables (2011) ou Samba (2014), d’Olivier Nakache et Éric Toledano, et Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? (2014), de Philippe de Chauveron et Christian Clavier, il y a des thrillers comme Dheepan (2015), de Jacques Audiard, ou des drames qui préfèrent plutôt une approche naturaliste et documentaire comme Bande de filles (2014), de Céline Sciamma. Cependant, ce n’est pas seulement la tendance la plus actuelle que nous nous proposons d’étudier dans le cadre de notre séminaire. Les œuvres abordés comportent également des classiques du genre comme Toni (1935), de Jean Renoir, Dupont Lajoie (1974), d’Yves Boisset, ou Tchao pantin, de Claude Berri (1983), ainsi que des exemples connus du «cinéma beur» et «post-beur» comme Le thé au harem d’Archimède (1984), de Mehdi Charef, et L’esquive (2004), d’Abdellatif Kechiche, sans oublier pour autant des productions aussi diverses que Taxi (1998), de Gérard Pirès, Welcome (2009), de Philippe Lioret, ou Omar m’a tuer (2011), de Roschdy Zem. Méthodologiquement nous nous appuyons sur les théories culturelles de la migration, et en particulier les concepts de l’inter- ou transculturalité, ainsi que sur l’outillage de l’analyse filmique.